À l’approche des fêtes de fin d’année, l’activité commerciale reprend de la vigueur à Maurice. Entre un pouvoir d’achat ponctuellement amélioré grâce aux bonis de fin d’année et une multiplication d’offres présentées comme avantageuses, les consommateurs se retrouvent dans un environnement propice à la dépense. Cette dynamique s’inscrit dans une tendance déjà observée sur le marché local, où les dépenses atteignent régulièrement leur pic au dernier trimestre.
Les chiffres récents illustrent cette saisonnalité. Au quatrième trimestre 2024, les dépenses de consommation finale — incluant celles des ménages et des administrations publiques — se sont établies à Rs 171 milliards, soit 87 % du PIB trimestriel selon les données de Statistics Mauritius. Les ménages représentaient 73 % de cette enveloppe, avec Rs 144 milliards. L’analyse des données annuelles montre que le dernier trimestre concentre 30 % des dépenses annuelles des ménages, une proportion nettement supérieure aux trimestres précédents, situés entre 22 % et 26 %. En glissement annuel, les dépenses de consommation finale ont progressé de 4 %, tandis que celles des ménages ont augmenté de 2,8 %.
Ces chiffres reflètent une réalité à Maurice : la fin d’année entraîne une intensification de l’activité commerciale, un phénomène rappelé à plusieurs reprises par les autorités. Dans son budget 2025-26, le gouvernement mauricien évoquait sa volonté de faire évoluer le pays d’une économie tournée vers la consommation vers un modèle davantage orienté vers l’investissement. Or, la période festive rappelle à quel point la consommation reste un moteur important du comportement économique local.
Des vendeurs plus actifs et des consommateurs plus solvables
La période de décembre crée une conjonction particulière. Les commerçants cherchent à dynamiser leurs ventes, tandis que les ménages disposent d’un budget plus fourni. Le boni de fin d’année, souvent utilisé pour les achats importants, influence directement le volume des transactions. Comme l’explique l’économiste Manisha Dookhony, les salaires majorés en fin d’année peuvent encourager certaines dépenses qui seront visibles plusieurs semaines plus tard. Elle cite par exemple l’effet du 14e mois versé en 2025, qui a contribué à des ventes importantes d’appareils de climatisation en janvier 2026, période marquée par de fortes chaleurs.
Pour cette année, l’absence de ce revenu supplémentaire pourrait modérer légèrement les dépenses, même si la période festive demeure un moment où les achats se multiplient. Mais selon l’économiste, cela pourrait aussi limiter la pression sur les prix. « Sans le 14e mois cette année, il est possible qu’il y ait moins de dépenses en décembre, ce qui ne va pas non plus accentuer l’inflation », précise-t-elle.
Elle observe également que les dépenses de fin d’année commencent désormais plus tôt. Le phénomène du Black Friday, devenu plus visible depuis cinq ans, agit comme un déclencheur. Beaucoup de ménages anticipent leurs achats dès novembre, ce qui contribue à intensifier l’activité commerciale sur une période plus longue.
Montée des arnaques : l’autre réalité des fêtes
Ce regain de consommation attire aussi des pratiques douteuses. Claude Canabady, secrétaire de la Consumers’ Eye Association, alerte sur une augmentation des arnaques liées à la période festive. « Les consommateurs doivent faire attention aux offres trop alléchantes », insiste-t-il. Un prix anormalement bas ou des conditions présentées comme exceptionnelles peuvent cacher des intentions malveillantes.
Les réseaux sociaux amplifient le phénomène. Messages personnalisés, audio manipulés ou contenus générés par intelligence artificielle contribuent à des sollicitations trompeuses. L’appât du gain touche autant les commerçants cherchant à attirer du monde que les escrocs misant sur la surcharge d’information de la période. Les achats réalisés lors des ventes nocturnes de rue sont particulièrement exposés, en l’absence de garantie, vendeurs éphémères, produits différents de ceux utilisés lors de démonstrations.
« On a tout le temps des cas d’arnaque. Les gens achètent un produit et une fois à la maison, il ne fonctionne pas. Le lendemain, impossible de retrouver le vendeur », raconte Claude Canabady. Plusieurs consommateurs se retrouvent ainsi sans recours, faute de garantie ou de preuve d’achat.
Vers une consommation plus prudente et mieux planifiée
Pour éviter ces pièges, les spécialistes préconisent une organisation plus rigoureuse. Manisha Dookhony rappelle que les ménages gagneraient à planifier leurs dépenses, surtout dans une période où les achats importants se concentrent sur l’électroménager, les biens immobiliers ou les projets de construction. Elle observe que les investissements immobiliers devraient repartir, tandis que l’achat de véhicules recule après un pic observé juste après le dernier budget.
L’économiste estime également que la société mauricienne reste fortement centrée sur la consommation. La tradition festive, qui mêle aspects culturels et moments familiaux, encourage les dépenses en cadeaux et loisirs. Elle souligne toutefois la nécessité d’inciter davantage à l’épargne, notamment en valorisant les mécanismes permettant de mettre de côté le bonus de fin d’année. « On se focalise beaucoup sur la consommation. Il faudrait développer de nouveaux moyens d’encourager l’épargne », dit-elle.
Claude Canabady partage cet avis et insiste sur l’importance d’un budget précis. Pour lui, les consommateurs devraient éviter de transporter trop d’argent liquide ou plusieurs cartes de crédit, afin de limiter les achats impulsifs. Il recommande de préparer une liste de dépenses avant de quitter la maison. Il souligne également que les lumières, la décoration et la mise en scène commerciale attirent les enfants, souvent moteurs d’achats non prévus.
« Il faut sensibiliser et éduquer les consommateurs aux dangers des arnaques », rappelle-t-il. Une garantie, une facture ou toute preuve d’achat restent indispensables.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !

