Maurice se trouve aujourd’hui à un moment charnière, tant sur le plan économique que politique. C’est le constat dressé par Roshi Bhadain, leader du Reform Party, invité sur le plateau d’Au Cœur de l’Info, diffusée le vendredi 19 décembre et animée par Ashna Nuckcheddy-Rabot.
Selon Roshi Bhadain, la gestion actuelle des affaires de l’État donne l’impression d’un pays en situation d’immobilisme. Il rappelle que lors du précédent exercice budgétaire, une enveloppe de Rs 5 milliards avait été votée pour la mise en œuvre du rapport du PRB, mais estime que les décisions prises depuis accentuent le malaise ressenti par une partie croissante de la population. « Aujourd’hui, le petit consommateur, voire le peuple lui-même, ne s’y retrouve plus. Le gouvernement a multiplié les promesses alors qu’il savait déjà que la situation économique était difficile », affirme-t-il.
Une économie sous forte contrainte
Le leader du Reform Party estime que plusieurs facteurs contribuent à la frustration sociale actuelle. Il cite notamment la Contribution sociale généralisée (CSG), appelée à être abolie en 2027, mais dont le montant sera réduit de Rs 600 dès l’année prochaine. « Tous les contribuables continuent pourtant de payer la CSG. Ce décalage entre ce qui est annoncé et ce qui est effectivement appliqué alimente un sentiment d’injustice et d’exaspération », soutient-il.
Sur le plan économique, Roshi Bhadain dresse un constat qu’il juge préoccupant et structurel. Il rappelle que Maurice importe près de 80 % de sa consommation, ce qui fragilise l’économie nationale dans un environnement international de plus en plus concurrentiel. « Le marché est devenu extrêmement compétitif et met notre économie à l’épreuve », souligne-t-il, estimant que le taux de croissance actuel, autour de 3,2 %, traduit une stagnation plutôt qu’une dynamique de relance. « En vingt ans, Maurice n’a pas réussi à développer un nouveau secteur économique structurant. Il peut y avoir une volonté affichée, mais il manque une équipe capable d’agir avec une vision claire et une réelle indépendance », analyse-t-il.
Une « lune de miel » politique déjà terminée
Sur le terrain politique, Roshi Bhadain estime que la période de grâce du gouvernement est désormais derrière lui, à peine six mois après son installation, une situation qu’il compare à celle observée en 2014. Il évoque un climat politique marqué par des tensions internes et un manque de cohérence dans l’action gouvernementale. « Ce n’est pas une dream team », tranche-t-il, faisant référence aux conférences de presse successives, aux nominations et révocations, ainsi qu’aux désaccords apparents entre certains ministres et des backbenchers.
Le rapport du PRB et la question salariale
Réagissant au rapport du PRB, Roshi Bhadain estime que la question de l’équité salariale demeure un enjeu central et sensible. Il souligne que certains ajustements salariaux atteignent jusqu’à Rs 266 000, alors que la compensation salariale accordée au plus grand nombre reste limitée. « Dans ces conditions, le discours sur la rigueur budgétaire et les contraintes économiques perd en crédibilité », affirme-t-il, rappelant que les salaires des ministres sont également concernés par ces réajustements. Selon lui, ces décisions risquent d’accentuer le fossé entre les catégories sociales.
Ses pistes pour relancer l’économie
Pour Roshi Bhadain, sortir de l’impasse actuelle nécessite un changement de cap clair et assumé. Il plaide pour un repositionnement stratégique de Maurice vers de nouveaux marchés, en particulier l’Afrique et Madagascar. « Maurice pourrait devenir un véritable point d’ancrage régional pour les entreprises souhaitant investir dans la zone », estime-t-il, mettant en avant la stabilité du pays, son cadre juridique et les facilités offertes aux investisseurs. Il évoque notamment le potentiel du secteur des pierres précieuses, regrettant que Maurice ne se soit pas positionné comme une plateforme régionale de type commodity exchange, alors que les conditions sont, selon lui, réunies.
Ce qu’il a dit sur…
…la gouvernance et les réformes
Roshi Bhadain affirme que le Reform Party a présenté 80 propositions de réformes afin de démontrer sa capacité à gouverner. « Gagner une élection par le biais d’alliances est une chose. Diriger un pays, avec une vision claire et des décisions courageuses, en est une autre. Il est temps d’en finir avec les fausses promesses et les jeux politiques qui exploitent les plus vulnérables », soutient-il.
…le law and order et la drogue
Sur la question de la dépénalisation, notamment du cannabis, le leader du Reform Party se montre prudent. Il estime que le débat doit se faire dans un cadre légal strict, avec des paramètres clairs visant à protéger les citoyens. « La méthadone est dépassée et la drogue de synthèse continue de faire des ravages. On ne peut pas avancer sans règles précises ni sans une approche rigoureuse du law and order », conclut-il.
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